L’absurde au commencement…

L’absurde au commencement, la révolte au quotidien, l’amour comme consentement, l’absurde en horizon ultime

Chroniques éternelles d’un voyageur en quête de radicalité
30 mai

L’algorithme n’aura pas (tout à fait) notre peau !

Nous sommes trop peu nombreux à comprendre ce qui se joue dans le débat autour de l’application #Parcoursup. Le triomphe de l’algorithme garantissant l’équité de traitement, le vieux rêve de justice par la science. Alors de quoi se plaignent tous ces jeunes ? Ils n’avaient qu’à travailler pendant leur année scolaire !
A 10 ans ma fille revient de l’école avec en tête « Pour réussir dans la vie, il faut avoir de bonnes notes ».
Ironie de l’histoire, c’est le système libéral qui aura réalisé l’administration que l’Union Soviétique avait rêvé voir aboutir. Enfin pas tout à fait car tant qu’il restera un être humain debout avec ses sentiments, l’algorithme n’aura pas le dernier mot.

28 mai

Il y a quelques rares rencontres qui ont provoqué en moi le sentiment de m’approcher du divin. Garder l’équilibre dans ces moments-là est difficile, d’un côté il y a l’écueil de prendre l’autre pour un être divin, de l’autre celui de croire que je fais vivre à l’autre une expérience semblable. Dans ces écueils se trouvent notre désespoir.
Comment rester humain, trop humain quand on a le sentiment d’avoir rencontré Dieu ? Continuer à aller à la rencontre de l’autre, car ce n’est que par la médiation de l’humaine finitude que m’offre son regard que je pourrai rencontrer de nouveau la part d’infini qui est en moi. L’infini n’a de sens que par la limite.

22 mai

Quand tu as tranché la question du suicide, il n’y a qu’un seul problème vraiment sérieux qui se pose à l’homme, a**** l’autre et le monde.

J’aimerais t’a**** sans rien attendre en retour. Je n’ai pas pas encore cette force de caractère. Du moins je m’efforce d’y parvenir, c’est ma manière à moi de cerner ce qu’il y a au cœur de ce que nous appelons a****. et que je n’ose point nommer ; le nommer c’est déjà le réduire par nos représentations existantes.
Tout autour de nous, les gens sont désespérés, plus ou moins ouvertement, de ne pas être assez a**** ; de mon côté, je suis malheureux parfois de ne pas suffisamment a****. Pas de cet a**** qui veut sauver l’autre ou le monde, ce n’est qu’une manière déguisée, une fuite pour se sentir davantage a*** ; non, de cet a**** qui regarde l’autre et le monde sans le comprendre et l’a**** tel qu’il est sans vouloir changer le moindre de ses mouvements.
J’aimerais t’a**** comme le lit du fleuve a*** celui qui s’y écoule, qui passe, le transforme et jamais ne revient le même.

21 mai

Jour de rentrée

Nous étions un 6. Ce jour-là, sa demande n’était pas très différente de celles qu’elle avait déjà formulées quelques mois auparavant. Et pourtant, à cet instant précis, ses mots résonnèrent en moi différemment. Était-ce cet imprévu du matin qui nous amenait dans un autre lieu ? L’éclat du soleil de septembre qui rassemble les fruits de l’été bien mûrs ?
Je sentis en moi une porte s’ouvrir : elle souhaitait, dans une simplicité nue, être mon amie ; je saisis alors au plus profond de moi qu’elle l’était depuis toujours. Ce que je ne savais pas encore, c’est que la porte qu’elle entrouvrait m’offrait la liberté.

Le monde est un vaste tableau noir sur lequel, parfois, nous dessinons des étoiles.

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14 mai

Il n’y a pas plus clair que le rire d’un enfant regardant Charlie Chaplin.
La vérité gît dans cette clarté.

10 mai

Le diable se cache dans les détails.
Une ministre a déclaré « En France, beaucoup de femmes ne connaissent pas le fonctionnement de leur propre corps ! Nous voulons remédier à cela »
Elle a probablement raison. Beaucoup c’est vague. Mais est-ce grave au point de vouloir y remédier ?
Dans le même temps, je constate qu’aucun membre du gouvernement ne semble ressentir comment fonctionne son propre mental. Cela m’inquiète davantage. Parce qu’ainsi ils ne saisissent pas ce que voir, penser signifie ; ils ne saisissent donc pas que l’autre peut voir, penser un monde très différent du leur.
C’est la clé de l’empathie. Naomi est morte d’un défaut d’empathie, pas d’un défaut de connaissance.
Apprendre à ressentir en même temps que connaître. A cela j’aimerais remédier. Je peux déjà commencer par mon propre cas.
Ce soir le monde est gris vu d’en bas.

http://www.lemonde.fr/societe/article/2018/05/10/affaire-naomi-musenga-les-zones-d-ombre-de-l-hopital-de-strasbourg_5297221_3224.html?utm_term=Autofeed&utm_campaign=Echobox&utm_medium=Social&utm_source=Twitter#link_time=1525975898

9 mai

Un ministre défend la position du Président en annonçant qu’il avance en s’appuyant sur la majorité silencieuse. D’abord réduire au silence, puis avancer sans douter. C’est ce que fait un tyran. Et les commentateurs subjugués par le nouveau Bonaparte d’admirer la technique. Ne jamais se taire.
Bref après la fête Macron, aujourd’hui c’était la fête à l’Europe, une utopie que les tyrans effacent un peu plus chaque jour.

8 mai

Une ministre en appelle à la psychanalyse pour justifier le couple présidentiel. Nous sommes gouvernés, symboliquement par Caligula et Agrippine. « Le pouvoir donne ses chances à l’impossible » aurait dit l’empereur romain.
A Philippe Lamberts qui l’interpellait au parlement européen, entre autres, sur le choix de ses mots « ceux qui ne sont rien », le président français répond « Je ne peux pas vous laisser dire cela ». Il n’a pas dit « Je ne suis pas d’accord avec vous » mais « Je ne peux pas vous laisser dire cela« . Cette petite phrase anodine que j’entends à de trop nombreuses occasions est lourde de signification. Elle signifie qu’en dehors de tout contrat social (la loi), un être humain se donne le droit et/ou le devoir de ce qu’un autre peut dire ou pas.
La spécificité de l’être humain est la limite et c’est la révolte prométhéenne qui la pose, ni dieu, ni animal.
Bref, aujourd’hui j’ai 43 ans.

7 mai

Ne jamais oublier que mes combats extérieurs ne sont qu’une fuite de mes propres contradictions.
Ne jamais oublier qu’un rire d’enfant ouvrant mon cœur, un rayon de soleil réchauffant ma peau, tes mèches blondes caressant mon nez sur ton cou donnent un sens à ce monde. Le reste est superflu.

26 avril

Fermeté et humanité, la pensée complexe du « en même temps » a une limite : l’action. C’est dans l’action que se révèle la nature de l’homme car à ce moment quelque chose échappe à sa pensée.
Vous êtes allongé(e) sur une plage, tout à coup sort de la mer un migrant venu pour vous de nulle part. Que faites-vous ? Ceci n’est pas une fiction, c’est le quotidien de milliers d’européens de nos côtes méditerranéennes.
C’est dans l’agir d’une telle situation que vous répondrez à la question : pourquoi l’homme ?

22 avril

Question de temps
A celui qui a reçu le don d’intuition et d’anticipation de ce qui vient, vient le jour où il comprend dans sa chair qu’il doit renoncer à ce don et consentir à ce que le futur ne s’offre à lui que dans le présent.

21 avril

Amour, raison et vérité
Aimer est une ascèse de vérité : sur le chemin d’aimer apparaissent le monde et soi dans leur nudité crue, au moment où l’on vit ce que l’on avait fait jusque là que penser « aimer à en perdre la raison ».

19 avril

La violence est dans le monde, au cœur des ouragans, dans les explosions des volcans, dans le choc d’une météorite, dans le big-bang originel. Pour quelle raison ne serait-elle pas non plus en moi?
Elle est en moi.
Mais par mon regard, la conscience du monde est aussi en moi. Elle me donne une responsabilité, celle de chercher un sens à cette violence et décider qu’en faire.
Tâche infinie car tout au bout attend le silence du monde.

18 avril

Des dictateurs et des hommes.
Un Président voit une minorité dans son pays affirmer qu’une autre manière de vivre est possible. Il l’isole puis envoie son armée et des gaz pour l’exterminer.
Un autre Président décide de lui envoyer des missiles pour le punir de cet acte abominable.
Ce même Président connaît lui aussi une minorité dans son pays qui souhaite vivre autrement, collectivement et sans piller les ressources de la terre. Il l’isole puis envoie ses CRS et leur gaz lacrymogènes pour la réduire au silence.
Qui décide de la ligne rouge qui sépare le président du dictateur ?
Et je regarde ces millions autour de moi qui considèrent incongru qu’on puisse douter du bien-fondé de l’envoi de ces missiles.
Quand votre voisine vous appelle à l’aide parce que son mari la bat, vous descendez filer une baffe au voisin en disant à la voisine de rester chez elle ? Non, vous accueillez la voisine chez vous. Le reste n’est que petits arrangements avec la réalité et sa conscience.

17 avril

Nous avons tous un Credo. Il est plus facile de réciter celui d’une religion, d’une doctrine que de chercher le sien.
Une idée que je ne sais pas incarner ne vaut rien
La pensée imaginative, la rêverie, est une incarnation

16 avril

Le fanatisme et l’héroïsme de l’homme tirent leur sève de la souffrance de la mère face au silence du monde que l’enfant impuissant n’a pu briser.

15 avril

Faute de réussir à instaurer un dialogue, ils cherchent le lien. Ce lien qui rassure et asservit à la fois. Sans cadre, le lien n’est que manipulation. Sans père, l’enfant devient objet de la mère. Le lien libère quand il ne se fait plus besoin mais profond désir.
Le lien porte en lui la toute puissance de l’unicité, le dialogue la reconnaissance de l’altérité. Mieux vaut un dialogue inachevé qu’un lien inapproprié.
Tôt ou tard, l’être humain reconnaît ses chaînes, souvent très tard.

14 avril

Sur le fronton des usines
Sur les tableaux des écoles
Sur le code des algorithmes
Sur le filigrane des billets de banque
Dans le silence de l’isoloir
Dans le vacarme des réseaux sociaux
Sur le casque de ce CRS
Sur la blouse de cette infirmière
Sur le banc du palais de justice
Sur les pavés de Roubaix
J’écris ton nom
Pour continuer de te nommer : Liberté

13 avril

Lacan affirme que l’inconscient est structuré comme un langage.
Jung affirme qu’il existe une forme de la pensée qui est en dehors de cette structure, pure enchaînement d’images et de sentiments.
Est-il possible d’unifier les deux ? S’il existe une structure de langage au sein de l’inconscient, sur quoi ou à partir de quel matériau s’est elle bâti ? Si de la « soupe » initiale de quarks a émergé la structure des galaxies, quelle était la soupe primordiale de l’inconscient ?

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12 avril

Je doute donc j’existe

10 avril

Le discours du Chef de l’Etat, Emmanuel Macron, à la conférence des évêques de France ne m’a pas laissé indifférent. Les temps changent. En 1940 c’est du Pape que l’ont attendait une parole condamnant les exactions alors qu’en 2018, c’est de lui que vient la parole salvatrice et la voie du courage. A ses côtés, la parole d’Emmnanuel Macron n’est que confusion, intentions que contre-disent et bafouent ouvertement ses décisions quotidiennes et celles de son gouvernement.
Il est bon pour retrouver une parole saine de relire le discours de Camus aux dominicains en 1948, il n’appelle pas notamment au lien mais au dialogue entre celui qui croit et celui qui ne croit pas : « Le monde a besoin de vrai dialogue, que le contraire du dialogue est aussi bien le mensonge que le silence, et qu’il n’y a donc de dialogue possible qu’entre des gens qui restent ce qu’ils sont et qui parlent vrai. […] Ce que le monde attend des chrétiens est que les chrétiens parlent, à haute et claire voix, et qu’ils portent leur condamnation de telle façon que jamais le doute, jamais un seul doute, ne puisse se lever dans le cœur de l’homme le plus simple. C’est qu’ils sortent de l’abstraction et qu’ils se mettent en face de la figure ensanglantée qu’a prise l’histoire d’aujourd’hui. »

http://dimensionesperanza.it/articles-en-francais/item/6418-lincroyant-et-les-chr%c3%a9tiens-albert-camus.html

9 avril

Ce matin sur France Inter, moment clé dans lequel se rejoue de manière concentrée le drame de notre monde ; question de Bernard Kouchner à Léa Salamé, à propos de « la guerre en Syrie, guerre immonde que nous avons contemplée sans rien faire » :  » Mais vous-même qui voyez ça qu’est-ce que vous dîtes ? ». Un instant le masque de Léa Salamé, qui depuis 4 minutes cherche chez l’autre un sens au monde, s’est soulevé laissant apparaître l’être humain désemparée devant le silence de celui-ci. Puis très vite elle le remet, c’est tellement plus confortable de revenir à ses certitudes : « Mais moi j’ai pas à dire,… j’ai juste à poser des questions »
En les écoutant tous les deux me revient me revient cet éditorial censuré de Camus le 25 novembre 1939 : « Un des bons préceptes d’une philosophie digne de ce nom est de ne jamais se répandre en lamentations inutiles en face d’un état de fait qui ne peut plus être évité. »
Camus donne sa vision du métier de journaliste qui pour préserver sa liberté a comme moyen selon lui la lucidité, le refus, l’ironie et l’obstination.

https://grandeursrvitude.wordpress.com/2015/10/13/les-devoirs-du-journaliste-selon-camus-1939/

https://www.franceinter.fr/emissions/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-09-avril-2018

8 avril

Lundi 2 avril j’ai senti un changement d’énergie en moi, brusque sans explication. De la joie à la tristesse puis une sourde colère me tirant d’une longue période de ma vie peu active. Ce n’est qu’en regardant la nature ce week-end que j’ai compris. La pleine lune apportait avec elle le printemps. Après ce long hiver, toute l’énergie de vie accumulée, telle le bambou qui se prépare sous terre, faisait irruption dès la première remontée des températures, emportant tout sur son partage.
Les états d’âme sont comme des vagues qui s’échouent sur la plage. Des courants marins profonds, insoupçonnés, en façonne la forme. Chercher à comprendre ce processus tue l’esthétique, je reste sur la plage à me réjouir de leur va-et-vient.

7 avril

Première fois de l’année où j’enfile mes lunettes de soleil, que je me mets torse nu, que j’ai envie d’un pastis. Toutes ces premières fois ont la saveur de la première gorgée de bière. L’été tout entier est contenu dans ces instants. Ce soleil me grise et fait fondre la moindre velléité de résistance au monde.

6 avril

Moins de 5 minutes, pas plus de 20 mots échangés. Moins que de minutes à attendre ensuite que l’on me tende un dossier sans autre explication qu' »aurevoir ».
Le temps n’est finalement pas si loin où j’échangerai davantage de mots dans une journée avec mon assistant google qu’avec un être humain. J’ai lu ce matin dans le quotidien Le Monde qu’Ikéa testait l’entretien de recrutement par une intelligence artificielle.
Au final, je crois que j’ai ralenti le processus et ai été la cause d’un retard, au moment où j’ai pris le temps de sourire à la secrétaire.
Bref, ce matin, nous avons passé une radio.

5 avril

Ce qui se passe dans cette école primaire de Tourcoing est à l’image de voies d’espérance de notre société. « Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve » dirait Edgar Morin en citant Hölderlin.
Il y a Mme S. enseignante de CP qui prend le temps d’observer, comprendre chacun de ses 25 élèves afin de trouver ce qui lui donnera envie d’apprendre. A. ne s’y trompe pas, il n’attend qu’une chose : que les roses du jardin fleurissent pour lui en apporter une.
Il y a M. L. éducateur sportif. Avant de le connaître on ne parlait jamais sport à la maison. Aujourd’hui A. n’aiment que deux choses à l’école : la musique et le sport. Et les deux lui donnent suffisamment envie d’apprendre le reste.
Enfin il y a F. qui trouve le courage chaque soir d’accueillir les enfants fatigués, les initier à des pratiques de centration et sourire aux parents, même (surtout) quand ils viennent les récupérer à 19h.
Je continue d’observer cette école chaque matin, la révolte et son consentement dans le moindre détail, il me (nous ?) faudra continuer de l’écrire, de la décrire pour qu’un jour quelqu’un se souvienne « ils ont dit non et oui ».

4 avril

Ce qui se passe dans cette école primaire de Tourcoing est à l’image de la déshumanisation de notre société, comme dans les hôpitaux, les palais de justice ou les prisons.
Notre société déploie une énergie folle à empêcher des terroristes de tuer et dans le même temps laisse des enfants se blesser sans s’émouvoir. Car ce qui me met le plus en colère ce n’est pas que des enfants se battent, mais qu’ils le fassent sous le regard d’adultes dont le silence vaut approbation. J’ai compris ma propre inhumanité le jour où je me suis entendu dire à mon fils : « Si quelqu’un te frappe et que le surveillant n’intervient pas, défend toi et frappe plus fort »
Ces mêmes adultes installent des barrières devant l’entrée de l’école pour empêcher une attaque terroriste obligeant les enfants à sillonner sur le parking entre les voitures manquant de les écraser à chaque instant. Homo sapiens, homo demens dirait Edgar Morin.
Ces mêmes adultes installent des barrières d’échange entre les surveillants et les parents ; au moment où j’aimerais discuter avec ceux à qui je confie mes enfants, je n’ai aucun nom, seulement ce numéro de portable anonyme à qui j’écris et qui ne répond pas. Alors je frappe à la porte de plus en plus fort : seule une personne du cabinet du maire me rappelle et me propose comme uniquement solution de discuter avec l’élue. Comme ultime folie, ils ont arrêté le contrat de la secrétaire, dommage collatéral des emplois aidés, qui dispensait encore un sourire au parent qui venait sonner à la porte de l’école.
Nous sommes des aveugles courant vers le précipice et rien ne semble pouvoir nous arrêter. Je continue d’observer cette école chaque matin, l’absurde dans le moindre détail, il me (nous ?) faudra continuer de l’écrire, de le décrire pour qu’un jour personne ne puisse dire « ils ne savaient pas ».

3 avril

La grève joyeuse. Assis sur le bitume, serrés les uns contre les autres à scander les mots d’ordre de colère est un des mes rares souvenirs de joie et de fraternité de mes années lycée. Je me révolte donc nous sommes.
Je suis un voyageur perturbé par la grève à la SNCF et dans le même temps je l’aime cette grève car elle me rappelle mes limites, m’oblige à trier l’essentiel du superflu, être créatif et faire de nouvelles rencontres.
Je rêve d’un barbecue géant dans chaque gare où se retrouveraient aides soignantes, étudiants, juges, enseignants… de trains réquisitionnés par les grévistes pour sillonner les gares abandonnées. Il faut hacker la grève, joyeusement.

2 avril

Au moment où notre chef de l’État fait miroiter un absolu pour finir de noyer le peu d’âme qui reste à nos concitoyens, Grand Corps Malade dans un magnifique titre Plan B chante l’absurde et la révolte. Le jour de gloire n’est pas encore arrivé, l’art et la révolte ne mourront qu’avec le dernier homme.

1er avril

Un article du Monde décrit dans le détail les dérives de l' »industrie pornographique ». Rien de neuf sous le soleil, c’est la réalité que je croise tous les jours dans les entreprises que je traverse, une violence sous un masque vénérable. Seul celui qui n’a pas fait son examen de conscience trouvera la situation du X plus sordide. Car en France aussi l’infirmière, l’enseignante, la femme de ménage se fait sodomiser brutalement tous les jours, symboliquement bien sûr. Quoi que, parfois elle croise Dominique S.

http://www.lemonde.fr/idees/article/2018/03/28/bienvenue-a-pornoland_5277647_3232.html?utm_campaign=Echobox&utm_medium=Social&utm_source=Twitter#link_time=1522252203

31 mars

7h du matin, sur mon vélo, tout au bout de la rue Gounod, je lève la tête de mon guidon, tout enveloppé de ma nuit. Elle est là simplement, sa blancheur presque pleine se détache sur un ciel bleu roi. Quand l’astre du jour se lève, elle, reine de la nuit se couche, enveloppée de ses nuages blanc-rosés.
Ces quelques secondes de spectacle avant que les nuages n’obscurcissent le ciel effacent tout. Il n’y a dans cet instant que le monde et moi, rien ne sert de comprendre, tout est là.
« Mais l’espoir n’est pas l’éternel
Et mon dieu que la lune est belle
Sur notre planète perdue »

30 mars

L’homme dans un environnement violent est comme dans la grenouille dans une eau dont la température augmente progressivement : il ne sent rien jusqu’à être ébouillanté.
Dans une école ordinaire de Tourcoing, la violence y est devenue tout aussi ordinaire. C’est A., 6 ans, qui décrit le mieux la situation : « Quand je me fais taper, je vais voir un surveillant qui me dit « Ce n’est pas grave ». J’en parle ensuite aux maîtresses qui me répondent « Mais vous avez bien des surveillants ! » »
Cette école est le microcosme de notre société : les moyens humains ont été réduits à la portion congrue, les adultes sont devenus des robots de l’enseignement ou de la surveillance ; ainsi des désaccords dégénèrent en violence, l’autorité désagrégée a été remplacée par un autoritarisme aveugle et sourd.
Bienvenue dans cette forge des temps post-modernes, fabrique des futurs héros et fanatiques.

29 mars

Jusqu’au plus haut sommet de l’État, nos représentants colportent la rumeur simplificatrice sur les intentions de ceux qui ont tué Mireille Knoll. Ils ne sont qu’une poignée de journalistes inaudibles dans le brouhaha pour pointer du doigt qu’à cette heure le chef de l’État nous égare en parlant d’assassinat et non d’homicide. Détail me diront la plupart de ceux qui m’entourent. L’humanité a commis beaucoup d’atrocités à partir de détails.
La lutte actuelle contre les fakenews n’a pas de sens, car il ne peut y avoir de vérité collective absolue (seul un chef de l’État en quête d’absolu peut la chercher). Il n’y a de vérité qu’individuelle, à l’intérieur de soi. Collectivement il ne peut y avoir que des tentatives d’approche d’une vérité plus grande qui nous dépasse. Toute tentative de construction d’une vérité absolue collective débouche sur la question de savoir qui a le pouvoir d’imposer sa vérité. La lutte contre les fakenews ne vient donc pas de leurs conséquences jugées désastreuses mais de ce que les détenteurs historiques de ce pouvoir l’ont perdu avec l’arrivée d’internet.
Est-ce grave ? Les guerres de religion ont suivi l’arrivée de l’imprimerie. Mais aussi la renaissance. Il n’y aura pas de nouvelle renaissance sans tumulte.

http://www.elysee.fr/declarations/article/hommage-national-au-colonel-arnaud-beltrame/

28 mars

« Et je dis à cette jeunesse de France […] :l’absolu est là, devant nous » a déclaré Emmanuel Macron en hommage national au Colonel Arnaud Beltrame.
C’est la limite de la pensée complexe car « en même temps » qu’il incite cette jeunesse à combattre tous les fanatismes, il la précipite dans ces fanatismes par ces mots « l’absolu est là, devant nous ».
Si le nom de l’assassin est tombé dans l’oubli, l’assassin est toujours là, et là, en chacun de nous.
Par les temps qui courent, si j’étais enseignant, ce n’est pas La Peste que je ferais lire à mes élèves mais Caligula. Dans le face à face entre le fanatique et le héros se rejoue le face à face entre Caligula et Scipion.
Dans ses carnets Camus notait : « Non, Caligula n’est pas mort. Il est là, et là. Il est en chacun de vous. Si le pouvoir vous était donné, si vous aviez du cœur, si vous aimiez la vie, vous le verriez se déchaîner, ce monstre ou cet ange que vous portez en vous. Notre époque meurt d’avoir cru aux valeurs et que les choses pouvaient être belles et cesser d’être absurdes. Adieu, je rentre dans l’histoire où me tiennent enfermé depuis si longtemps ceux qui craignent de trop aimer. »
Pour étancher sa soif d’absolu, la jeunesse a besoin d’un cadre qui l’aide à consentir que l’absurde est là, devant nous.

http://www.elysee.fr/declarations/article/hommage-national-au-colonel-arnaud-beltrame/

27 mars

Dis Papa, y a-t-il des morts qui ont plus de valeur que d’autres, qui méritent plus d’honneur ou d’indignation que d’autres ?
Il ne pourra y avoir de paix véritable tant que la vie d’un être humain quel qu’il soit, quoi qu’il ait fait, aura une valeur différente de celle d’un autre. Tout le reste n’est que vaine querelle de pouvoir.
Dans une patrie, c’est inimaginable, même pas entendable. Dans une matrie peut-être.
En attendant, je continue de jouer Guido, notre président se prépare à rendre les honneurs à ce migrant inconnu mort en méditerranée pour nous alerter que l’humanité pourrait disparaître.
Ma fille, mon fils, la vie est belle.

26 mars

Toute action tendant à émanciper enferme dans le même temps. Ainsi en est-il de l’enseignement scolaire.
Seule une présence qui se retire, tel l’océan sur la plage, nous offre le miroir de notre liberté.

25 mars

Donner sa vie pour en sauver une autre attire les honneurs, la donner gratuitement pour rien est interdit. La virilité se cache dans les détails. Notre propre mort nous échappe et nous pensons comprendre celle de l’autre. Ne nous connaissant pas nous-même nous nous rassurons en pensant comprendre l’autre.

24 mars

Le mythe de la virilité nous condamne-t-il à une position virile où le masculin l’emporte sur le féminin ?
Quel est le mythe qui conduit à l’acceptation sans renoncement ? à l’affirmation sans domination ?
Que nous dit le mythe de Némésis ?

23 mars

La patrie m’apparait tel un vautour suivant les fanatiques pour dépecer les héros qu’ils laissent sur leur passage.

22 mars

Tout en haut héroïsme et fanatisme
nous aveuglent de leur éclat
dans l’ombre ici bas
grimpe le fascisme.

Les idées sont comme les fleurs. Au gré du vent, des rencontres de ce que je lis, vois, entends, une d’elles germe dans mon esprit. Certaines d’entre elles ont une croissance très rapide et se sentent vite à l’étroit dans la toile de mon cerveau. Je les transplante alors sur cette feuille virtuelle pour qu’elles puissent s’y épanouir et peut-être aller germer ailleurs, plus tard. Roubaix, le 22 mars 2018

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